Pour tresser les chants sacrés et profanes des trois religions monothéistes d’Al Andalus avec la Canso de Fin Amor des Trobairitz (les femmes troubadours occitanes), la poésie Soufie du philosophe persan Hafez, les chants extatiques d’Hildegarde Von Bingen ou encore la mystique de Rabi’a Al Addaouiyya, il faut convoquer la grâce et l’érudition, le talent et l’ambition nécessaires à la réalisation d’une telle aventure.
Seul le duo virtuose de Françoise Atlan et Shadi Fathi pouvait offrir ce miracle sonore, cette douce alchimie. Avec leur Souffle des Roses, nimbé d’inspirations exquises et d’improvisations fleuries, les chants épousent les volutes envoûtantes du setâr, entrelaçant les héritages, les langues et les percussions.
Dans ce parcours initiatique à travers les âges, Françoise Atlan et Shadi Fathi mènent leur auditoire sur des territoires musicaux faits d’intimité et d’altérité, aux confins des traditions séfarades d’Orient et d’Occident, et des foisonnantes musiques d’Iran.
Puissants comme le parfum des Roses. Délicats comme ses pétales offerts au vent…
« … Les deux immenses musiciennes Françoise Atlan et Shadi Fathi, pour la première fois réunies sur un même projet, offraient un délicat mélange de morceaux choisis où nostalgie d’Al Andaluz, poèmes persans, mélodies des trobairizt et extases d’Hildegarde Von Bingen croisent leur univers. Quelques accords du shourangiz de Shadi Fathi, puis la voix nue de Françoise Atlan s’élève. Temps en épure où les histoires éclosent du phrasé sobre, et les modulations, loin d’être de futiles ornements, ajoutent au sens. […] La musique porte les marques du souvenir, recueil précieux d’émotions qui ont été. Les attaques et les tremolos du shourangiz semblent préfigurer celles qui caractériseront la guitare flamenca… héritages qui se mêlent, se fondent, et livrent de nouvelles gemmes. La joie se décline avec enthousiasme, s’enchaîne en un même souffle, que rythment les percussions, tambourin, bendir… Les deux musiciennes, complices, évoquent les tourments d’amours que le chant apaise, le mécontentement des « sages » qui voudraient voir l’amoureux quitter le chemin de la taverne… […] L’être se voit en proie à quelque chose qui le dépasse, et le thème ressassé, envoûtant, jouant entre demis et quarts de ton, bruit avec une intensité bouleversante, la voix de l’instrumentiste rejoint celle de la chanteuse. […] Si la douceur pouvait un jour réinventer le monde, elle aurait sans doute ces accents. »
Journal ZIBELINE / Maryvonne Colombani, Octobre 2018